En 1987, Robert Solow, prix Nobel d’économie, s’étonnait de ne pas trouver la trace de l’informatisation des entreprises dans les statistiques de productivité. La mention de ce paradoxe aux Assises du numérique qui se sont tenues le 1er octobre 2009 dans le grand amphitéâtre de l’université Paris-Dauphine était bienvenue tant on peut s’interroger sur une réédition, numérique cette fois-ci, de ce constat troublant: les discussions sur l’oeuf des usages et la poule des infrastructures (à moins que ce ne soit l’inverse!) laissent complètement de côté l’analyse des impacts de cet investissement potentiellement massif sur l’économie, les entreprises, les collectivités et plus généralement les utilisateurs. Rien sur la concurrence, rien sur les organisations du travail, rien sur le management, rien sur la productivité, rien sur la formation, rien sur les relations avec les clients, etc.
Pourtant, une exception s’est manifestée et elle est venue d’où on ne l’attendait pas: c’est en effet la représentante des artisans qui a expliqué, assez maladroitement il est vrai, comment dans le BTP par exemple les relations entre les maîtres d’ouvrages, les maîtres d’oeuvre et les sous-traitants vont se déformer sous l’effet d’un équipement massif des entreprises artisanales en matériels et services numériques. Malheureusement rien n’a été dit des impacts de cette transformation sur par exemple la formation des salariés ou des chefs d’entreprise ni sur ce que ça pourrait signifier ou pas dans la transmission des savoir-faires ou même dans le management quotidien des équipes. Dommage, car il y a sûrement beaucoup à apprendre de l’analyse du bouleversement numérique de ces activités hautement qualifiées. Quoi qu’il en soit le pragmatisme de l’approche mérite d’être souligné.