Souvenez-vous. Il y a quatre ou cinq ans, dans le monde RH on n’entendait parler que d’eux, les centres de services partagés (CSP).
Il faut admettre que le modèle est séduisant. Grâce aux nouvelles technologies (intranet et libre-services « on line »), les salariés et les managers effectuent l’essentiel de leurs transactions RH en ligne, un centre d’appel (ou deux, un pour les salariés, un pour les managers) assure l’assistance aux utilisateurs en cas de difficultés ou pour ce qui n’est pas réalisable de cette manière. Le cas échéant, des experts prennent le relais pour les questions les plus pointues. Et, in fine, toute cette organisation permet d’une part de réduire les effectifs administratifs tout en améliorant le service rendu aux salariés et aux managers, d’autre part aux cadres RH (RRH et DRH) de plus et mieux se concentrer sur un rôle de soutien et d’assistance aux managers dans la définition, la conduite et l’évaluation de leurs opérations ainsi que sur les relations sociales. La description est probablement un rien idyllique mais la formidable réputation de cette forme d’organisation est avérée.
Pourtant, s’ils n’ont pas disparu de nos écrans de contrôle, ils sont aujourd’hui passés à l’arrière-plan: voyez par exemple le tableau ci-dessous qui présente l’évolution du nombre de requêtes dans Google contenant les mots « shared services » pour la catégorie « human resources » depuis 2004. En 2009 on atteindra difficilement 60% du nombre de requêtes atteint mi 2005.
Comme on peut facilement en trouver d’autres, moins spectaculaires et donc plus difficiles à interpréter, je n’utilise ces données que pour éclairer mon propos d’aujourd’hui sur le relatif déclin de l’intérêt pour les CSP RH.
Alors, que s’est-il passé?
- même si ce n’était pas qu’une mode, c’était aussi une mode et comme toute mode, celle-ci est passée, remplacée par une autre (l’entreprise 2.0, les RH 2.0, les réseaux sociaux dans l’entreprise, etc.) qui, comme la précédente, s’appuie bien évidemment sur des projets ambitieux, des réalisations tangibles et des innovations concrètes. Pour les CSP comme pour le 2.0 il ne faut pas confondre le mouvement de fond et l’écume de la vague. Dans un cas comme dans l’autre, la fonction RH se devait et se doit d’être le prosélyte de tout ce qui rend l’entreprise agile, réactive et donc performante;
- la mise en place de CSP a parfois été perçue, non sans quelques raisons, comme le faux-nez, en tout cas le préalable, d’une externalisation d’une partie de la fonction RH et, pire encore, de sa délocalisation dans des pays à moindre coût de main d’oeuvre (offshoring). Ce tryptique n’a rien d’automatique: on peut mettre en place des CSP sans externaliser et l’externalisation peut parfaitement s’effectuer dans la métropole!
- même à la mode et même décriés, les CSP sont un incontestable succès. Je renvoie sur ce point à l’étude annuelle de Deloitte sur le thème (cf notamment l’article publié par solutions-logiciels.com). J’en retiens que les services partagés sont entrés dans les moeurs et que l’externalisation n’est plus un tabou. Et c’est la banalisation de cette forme d’organisation qui explique que la page de l’actualité s’est tournée: ceux qui devaient être convaincus l’ont été et ont mis en place (et pas seulement en RH bien entendu) des CSP qui tournent. C’est le cycle naturel d’une innovation!
- cela étant je souhaite aussi attirer l’attention sur les travers possibles de cette modalité d’organisation, qui pourraient aussi justifier eux aussi un engouement plus raisonné que par le passé. En effet, avec le cumul de libres-services, de centres d’appels et de recentrage sur le « business partnership » pour une fonction RH aux effectifs amoindris, le risque existe pour la DRH de se déconnecter des réalités du terrain. Je pense en particulier à cette très grande entreprise française qui vient de traverser une épreuve terrible à laquelle une des réponses apportées dans l’immédiat est précisément le recrutement de RRH de proximité, à rebours de la politique « tout CSP » conduite jusque là.